jeudi 19 septembre 2013

Les Geoffroy, apothicaires parisiens


La dynastie des Geoffroy, apothicaires à Paris, remonte au xvie siècle.




Étienne [I] Geoffroy (1586-1673), fils de Baptiste Geoffroy reçu maître apothicaire en 1584 et grand-père de Matthieu-François, fut reçu maître en 1611, devint échevin de Paris en 1636, consul en 1642 et juge en 1656. Il s’installa rue du Bourg-Tibourg (IVe), « près le cimetière Saint-Jean »,






où son fils Étienne [II], reçu maître en 1638, lui succédera.





Ses armoiries étaient « d’azur, au nom de Jésus d’or, accompagné de trois globes du même. »  







N’ayant laissé que des expertises dans l’affaire des poisons entre 1679 et 1682, Matthieu-François Geoffroy (Paris, 20 mai 1644-26 octobre 1708), reçu maître en 1666, échevin en 1685 et premier consul en 1694, a néanmoins joué un rôle important dans la famille. Ses relations étaient nombreuses dans le monde du commerce, dans la société des savants et celle des artistes. Son officine de la rue du Bourg-Tibourg fut citée comme l’une des plus importantes de Paris, par le Dr. Martin Lister (1638-1712) :

« The Apothecaries Shops are neat enough, if they were but as well stored with Medicines ; and some are very finely adorned, and have an Air of greatness, as that of Monsieur Geofferie, who has been Provost des Merchands, in the Rue Burtebur, where the Entry to the Basse Cour is a Port-cochier, with Vasa’s of Copper in the Niches of the Windows ; within are Rooms adorned with huge Vasa’s and Mortors of Brass, as well for sight, as for use. The Drugs and Compositions are kept in Cabinets disposed round the Room. Also Laboratories backwards in great perfection and neatness. » [sic] (A journey to Paris in the year 1698. London, Jacob Tonson, 1699, p. 238-239)
[Les boutiques d’apothicaires seraient assez propres, si elles étaient aussi bien garnies de drogues ; et il y en a de fort ornées, et qui ont un air de grandeur, telle que celle de Monsieur Geoffroy, qui a été prévôt des marchands (il fut échevin et non prévôt des marchands), dans la rue du Bourg-Tibourg, où l’entrée de la basse-cour est une porte cochère, avec des vases de cuivre  dans les niches des fenêtres ;  à l’intérieur sont des pièces ornées d’énormes vases et de mortiers de bronze, autant pour le spectacle, que pour l’usage. Les drogues et les préparations sont dans des armoires rangées autour de la pièce. En arrière sont des laboratoires parfaitement montés et propres.]

Surtout, des conférences se tenaient chez lui où Jean-Dominique Cassini (1625-1712) apportait ses planisphères, Jean Truchet (1657-1729), en religion le Père Sébastien, ses machines, Louis Joblot (1645-1723) ses pierres d’aimant, Joseph du Verney (1648-1730) faisait des dissections et Guillaume Homberg (1652-1715) des opérations de chimie, et où se rendaient plusieurs autres savants fameux. Par son mariage avec la fille de Jean Devaux (1611-1695), chirurgien célèbre, il était en rapport avec le monde médical.






Ses armoiries étaient « d’azur, à la tour d’or surmontée de trois donjons ». On lui connaît deux ex-libris, dessinés par Sébastien le Clerc et gravés par Claude Duflos, fils d’un chirurgien, qui portent ses armoiries, la devise « Turris fortissima Deus » [Dieu est une tour très forte] et la légende « Matthæus Franciscus Geoffroy Pharmacopoeorum Parisiensium antiquior Præfectus, Ædilis & Consul » :





l’un avec deux petits génies représentant la Pharmacie, à gauche, tenant une balance, et la Médecine, à droite, tenant le bâton d’Esculape ;





l’autre avec un piédouche portant une draperie sur laquelle se déroule la légende.
Matthieu-François Geoffroy eut deux fils, tous deux membres de l’Académie royale des sciences et de la Société royale de Londres.






L’aîné, Étienne-François Geoffroy (Paris, 13 février 1672-6 janvier 1731), reçu maître apothicaire en 1694, puis docteur en médecine en 1704, devint professeur en médecine au Collège royal (1709), professeur de chimie au Jardin royal (1707) et doyen de la Faculté de médecine de Paris en 1726. Décédé rue des Singes [rue des Guillemites, IVe], où il habitait depuis 1719, il fut l’auteur « Des différents rapports observés en chimie entre différentes substances » (in Histoire de l’Académie royale des sciences. Année M. DCCXVIII. Paris, Imprimerie royale, 1741, p. 202-212) et d’un Tractatus de materia medica [Traité de matière médicale] (Paris, Desaint et Saillant, 1741, 3 vol. in-8).







Sa bibliothèque fut vendue à partir du 4 juillet 1731 : Catalogus librorum viri Cl. D. Stephani Francisci Geoffroy, doctoris medici, antiqui facultatis Parisiensis decani, Regii in Medicina & Chymia Professoris, Regia Scientiarum Academiæ Parisiensis necnon Societatis Londinensis Socii (Paris, Gabriel Martin, 1731, in-8, [8]-153-[2]-[1 bl.] p., 2.146 lots [23 numéros doublés]).
Spécialisée dans les Sciences et Arts (1.632 lots), surtout médecine (1.092 lots) et histoire naturelle (343 lots), cette bibliothèque contenait aussi des livres dans les domaines de l’Histoire (246 lots) et des Belles-Lettres (161 lots), très peu dans ceux de la Théologie (39 lots) et de la Jurisprudence (11 lots), des estampes (33 lots) et « Un Droguier, en deux grandes Armoires de bois de noyer, dont les portes contiennent 800. pots de verre ; & dont les tablettes & tiroirs sont remplis de differentes pieces concernant l’Histoire Naturelle, d’un Herbier, et de differens Animaux renfermez dans des tubes de verre scellez hermetiquement. Un Squelette humain, renfermé dans une boëtte vitrée. Plusieurs Microscopes de differentes grandeurs. » [sic] (p. 253).







Le fils cadet, Claude-Joseph Geoffroy (Paris, 8 août 1685-9 mars 1752), fut reçu en 1703 et succéda à son père, dans l’officine de la rue de Bourg-Tibourg, en 1708. Il publia de 1707 à 1751 de nombreux mémoires dans l’Histoire de l’Académie royale des sciences, et devint échevin de Paris en 1731. De son second mariage, il eut un fils, Claude-François Geoffroy (Paris, v. 1728-18 juin 1753), qui continua les traditions pharmaceutiques de la famille : il fut reçu maître en 1748, mais mourut prématurément, sans successeur.





La vente de leur bibliothèque se déroula rue du Bourg-Tibourg, du mardi 5 au samedi 9 février 1754, avec un Catalogue des livres et estampes de défunts Mrs. Geoffroy [père et fils], de l’Académie Royale des Sciences (Paris, Gabriel Martin, 1754, in-12, [2]-120-18-[2] p., 1.608 lots de livres [15 numéros doublés, 1 triplé] et 69 lots d’estampes).
Le domaine des Sciences et des Arts dominait (944 lots), avec la médecine (495 lots) et l’histoire naturelle (283 lots), suivit par ceux de l’Histoire (294 lots), des Belles-Lettres (284 lots), de la Théologie (52 lots) et de la Jurisprudence (18 lots). La vente des livres rapporta 14.294 liv. 16, celle des estampes 5.790 liv. 19.






Cette vente avait précédé celle du cabinet de curiosités d’histoire naturelle de Claude-Joseph Geoffroy, dont le Catalogue raisonné des minéraux, coquilles, et autres curiosités naturelles, contenues dans le Cabinet de feu M. Geoffroy de l’Académie Royale des Sciences (Paris, H. L. Guérin et L. Fr. Delatour, 1753, in-12, viij-94 p., 597 lots) fut publié par son neveu, Étienne-Louis Geoffroy ((1725-1810).
    


  

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